Le 13 novembre 2020 ont eu lieu les 6èmes rencontres NAMS, dont le thème portait sur la compréhension des comportements alimentaires. La webconférence, animée par Philippe Legrand d’Agrocampus-INSERM, a été coorganisée par Valorex, Lactalis, Sodiaal, l’Institut NuMeCan et Biotech Santé Bretagne.

Trois spécialistes ont exposé leur avis sur le sujet : Claude Fischler, Sociologue et Directeur de recherche au CNRS, Emmanuelle Pignède, Directrice des Etudes Internationales chez Lactalis et Ronan Thibault, médecin nutritionniste au CHU de Rennes.

Claude Fischler : sa vision sociologique

Selon Claude Fischler, même si manger est la fonction biologique première, le comportement alimentaire est avant tout social. Il peut être déterminé par des états internes de l’organisme mais l’est aussi par les autres et par les normes sociales qu’ils nous imposent. En France, les horaires de prises de repas sont cadrés, par exemple : à 13h10, 54% des français mangent. De plus, l’évolution de l’humanité s’est faite autour de la collecte de ressources alimentaires puis par leur distribution et leur partage. La notion collective est donc déjà encrée depuis bien longtemps… et elle est universelle : manger seul dans la plupart des cultures est stigmatisé, ce serait gage de mauvaises idées ou de non-partage.  Même si certains pays comme les Etats-Unis ou la Grande Bretagne et même la France deviennent de plus en plus individualistes, il ne faut pas perdre de vue que l’acte alimentaire répond à des interactions sociales et que les dimensions psychologiques y ont une place importante.

Emmanuelle Pignède : sa vision industrielle

Pour Emmanuelle Pignède, le fait de comprendre les comportements alimentaires des consommateurs est aujourd’hui primordial. En effet, les industries font face à une grande concurrence de marques dans les supermarchés et les consommateurs sont de plus en plus informés et exigeants (notamment grâce aux applications type Yuka). Pour qu’un produit soit acheté, il faut que le consommateur y voie un bénéfice pour lui. Pour comprendre ces comportements, Lactalis mène des enquêtes qualitatives et quantitatives avec l’aide des nouvelles technologies pour gagner en précision comme les neurosciences et l’intelligence artificielle. Avec ces études, les motivations, besoins et freins des consommateurs émergent et les tendances se dessinent. Manger des produits sains, consommer responsable (local et de saison) et se faire plaisir constituent les grandes tendances d’aujourd’hui.     

Ronan Thibault : sa vision clinique  

Pour clore ce débat, Ronan Thibault a apporté sa vision médicale. Il a d’abord souligné les efforts faits par les industries sur la composition de leurs produits et notamment la plus faible teneur en sel et en sucre.

Toutefois, selon lui, les personnes atteintes de troubles du comportement alimentaire (TCA) sont souvent dans le déni. Pourtant, ces TCA peuvent aboutir à de graves pathologies telles que la dénutrition (environ 3 millions de personnes en France) et l’obésité morbide. Ils se traduisent par une perte de contrôle, des troubles anxio-dépressifs, une mauvaise image corporelle, des troubles digestifs. Une conduite alimentaire anormale entraînera des conséquences néfastes sur la santé physique et une forte souffrance psychologique. Il existe plusieurs types de TCA comme l’anorexie mentale (dénutrition), la boulimie (purge, vomissements) ou l’hyperphagie boulimique (obésité, surpoids). Malgré un grand nombre de personnes touchées, Ronan Thibault regrette un sous-diagnostic de ces pathologies, qui nécessiteraient d’être prises en charge dans des unités dédiées sur le plan psychiatrique et nutritionnel.

Merci d’avoir été aussi nombreux pour cette édition particulière et rendez-vous en automne 2021 pour les prochaines rencontres 😉